Ils sont en grève depuis 53 jours

Grand Bleu: Deux grévistes assignés au tribunal de Grande Instance par leur employeur

  • Publié le 6 décembre 2016 à 15:58

Nouveau rebondissement dans le conflit social qui oppose les salariés de Croisières et Découvertes et leur direction, depuis 53 jours. En grève depuis le 15 octobre dernier pour réclamer des revalorisations de salaire, deux salariés viennent de recevoir une assignation devant le tribunal de grande instance de Saint-Denis, ce jeudi 8 décembre 2016, à la requête de leur employeur.

Après l'échec des négociations à la direction du travail (DIECCTE) les 19 et 26 octobre dernier, la tension était montée d'un cran, le 20 novembre, après l'arrivée d'un nouveau capitaine. Selon les grévistes, ce recrutement constituait une violation du droit de grève. Questionné à ce sujet, Olivier Del Vechio, explique que l'arrivée du capitaine, qui avait déjà travaillé pour l'entreprise en 2012, n'avait rien à voir avec la grève : "Cela fait des mois qu’on recrute, ce sont des postes qui sont rares et avant le conflit nous étions déjà en procédure de recrutement. J’ai une personne en formation jusqu'à fin février et une qui a démissionné fin août, j'ai donc deux postes à pourvoir, un jusqu’à fin janvier et l’autre sur un plus long terme".

Mais, nouveau coup de théâtre, le 3 décembre dernier, le capitaine "remplaçant"démissionne, ce qui rajoute encore de l'huile sur le feu. Les grévistes assurent n'avoir exercé aucune pression sur l'intéressé, quand le patron de la société livre une autre version des faits. “Le capitaine m’a dit textuellement : j’ai l’impression de me déplacer avec une cible dans le dos, je me fais interpeler dans la rue "Le Corse par-ci , le Corse par là”. Du coup, il a préféré jeter l’éponge".

Assignés pour "abus du droit de grève"

Le conflit social prend donc une nouvelle tournure avec l'assignation en justice des deux derniers grévistes de la société, jeudi prochain, à la requête de leur employeur. "Leur action constitue un abus du droit de grève, aussi j'attends du juge qu'il fasse cesser ce mouvement et que l'activité puisse reprendre normalement", plaide Olivier Del Vechio.

Parmi les arguments mis en avant par la direction, il y a le fait que, depuis le 30 octobre, seules deux personnes sont en grève sur les 21 employés, et qu'au plus fort de la mobilisation,  les grévistes n'étaient que 5 sur 21 employés. "Ce mouvement n'est donc pas une action collective", tranche la direction. Bruno Jallet, délégué du personnel, en grève avance d'autres chiffres et d'autres explications: si deux marins sur huit sont toujours en grève, c'est parce que "les autres ayant du reprendre le travail pour des raisons économiques, mais ils sont complètement solidaires de notre mouvement, on se serre les coudes", précisait-il, fin novembre.

200 000 euros de pertes / 53 jours de salaire en moins

Sur l'aspect économique justement, direction et salariés s'affrontent depuis plusieurs mois, chacun dégainant ses chiffres. Pour rappel, les salariés demandent la revalorisation de leurs salaires au niveau du "salaire forfaitaire", qui est la base de calcul des cotisations par la Caisse de sécurité sociale des marins, soit un coût total annuel de 20 000 euros, ainsi qu'une augmentation de salaires pour le personnel sédentaire d’un montant de 200 euros nets, résume Clara Derfla, secrétaire générale de l'UR 974.

Une augmentation que la direction refuse catégoriquement, argant que le chiffre d'affaire de la société est à la baisse du fait d'une activité en berne. "Ils disent que je gagne 14 000 euros, bientôt je vais gagner plus qu’un patron du Cac 40. La vérité c'est que mon épouse et moi on se partage 5000 euros à tous les deux". Quant aux dividendes distribués dans le passé à la holding HDV, qui chapeaute la société,  "ils ont servi à rembourser un prêt, ce n’est pas de l’argent qui est tombé dans ma poche", se défend-il.

En attendant, des deux côtés, on chiffre les pertes liés au conflit social. Les deux Grand Bleu étant immobilisés, le manque à gagner dépasserait les 200 000 euros pour Croisières et Découvertes.

Du côté des salariés, c'est la solidarité qui permet aux deux grévistes de tenir le coup, après 53 jours de conflit.  Une page Facebook a d'ailleurs été créée pour soutenir le mouvement. Elle sert également de journal de bord aux grévistes. "C'est difficile pour eux, mais ils reçoivent beaucoup de témoignages de soutien. Nous allons préparer notre défense pour jeudi", conclut Clara Derfla.

www.ipreunion.com

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