Tribune libre de Jean-Hugues Savigny

"À tous les indécis : Mélenchon plutôt que l'abstention !"

  • Publié le 20 mars 2017 à 11:16

Alors que l'élection présidentielle se rapproche, "la clé du scrutin appartient immanquablement aux indécis", selon Jean-Hugues Savigny. Le choix de son candidat est fait : ce sera Jean-Luc Mélenchon. Nous publions son courrier de lecteur dans son intégralité ci-dessous.

La clé du scrutin présidentiel appartient immanquablement aux indécis. A un mois du scrutin, les fluctuations des intentions de vote, tous instituts confondus, sont tellement stables que le scénario final semble écrit par avance. A part un faux pas de campagne, une calamiteuse prestation télévisuelle d’un des potentiels vainqueurs présumés, ou d’un fait exceptionnel, … il n’y aura donc pas, au terme du second tour, de changement notable de politique en France, faute de changement de politique en Europe. La seule inconnue du scrutin réside dès lors dans une immixtion forte et convergente de ces indécis (près de 40% des sondés) sur un candidat qui se détourne de l’actuelle doxa portée par un E. Macron, un F. Fillon en prolongeant encore, avec la complicité de l’Allemagne, le "coup d’Etat financier" ou même, dans une moindre mesure, par le Parti socialiste … nonobstant la ligne personnelle de son candidat, B. Hamon, imposé par la primaire de la belle Alliance après la déflagrante désertion du sortant F. Hollande.

C’est précisément une telle immixtion populaire que vise JL Mélenchon en prônant depuis 2008 la révolution citoyenne, pour décrocher la victoire mais aussi mettre un terme, via une constituante, à l’actuelle monarchie présidentielle, et instituer une VIème République dont certains traits sont déjà connus (restauration de l’intervention populaire, la révocation d’élus, régime parlementaire, nouvelles libertés et émancipations individuelles, nouvelles citoyenneté dans l’entreprise, …) mais aussi une immixtion populaire pour enfin oser en Europe, avec quelques autres pays, une insoumission – d’où, le mot d’ordre "La France insoumise" – aux actuels traités et donc leur réécriture pour gommer les perverses incitations aux dumpings sociaux et fiscaux tout en enclenchant une décisive bifurcation écologique.

A l’inverse, M. Le Pen se contenterait, elle, d’une faible implication populaire pour accéder, par effraction en quelque sorte aux plus hautes fonctions de ce même présent régime, espérer décrocher une majorité de circonstance complaisante et réaliser son "coup d’Etat ethnique" tant attendu.

Naturellement, le projet bien compris de JL Mélenchon repose sur un renoncement majoritaire au "chacun pour soi" pour une adhésion à un projet collectif d’amélioration significative de la situation sociale du pays par une relance économique de type keynésien en injectant 273 milliards d’argent public dans l’économie, relance accompagnée d’un protectionnisme solidaire (taxes sur les produits importés écologiquement et socialement néfastes, taxe carbone aux frontières, …). Ainsi, d’un côté, 100 Mds d’investissement publics dont 45 Mds fléchés vers l’urgence sociale (18Mds pour le logement public, 12 Mds pour les crèches, 5 Mds pour les EHPAD, 10Mds pour l’accessibilité des personnes handicapées), 25 Mds pour le plan "100% énergies renouvelables", 20Mds pour les isolations thermiques, …

Mais aussi, de l’autre, un engagement de 173 Mds en fonctionnement avec comme objectif : 6% de chômage en 2022 (création de plus de 2 millions d’emplois dans le secteur marchand, de 440 000 emplois aidés, de 420 000 emplois aidés, de 820 000 emplois coopératifs (Etat employeur en dernier ressort), par le relèvement du minimum vieillesse, la revalorisation du smic (+200€/mois) corrélativement des petites retraites, des salaires des fonctionnaires, par l’éradication aussi de la pauvreté, un renforcement des services publics d’Etat, avec notamment 60 000 enseignants supplémentaires, …., le remboursement des soins à 100%, +10 000 médecins, +52 000 soignants, la création d’un revenu d’autonomie pour les 18-25 ans, etc.

Cette relance produira économiquement un effet levier tel (multiplication par 2 ou par 3 selon le FMI lui-même) qu’un surplus de recettes publiques de l’ordre de 190Mds d’€ est prévisible sur tout le mandat.

Naturellement, le financement de ce volontarisme politique, générateur d’une vertueuse croissance verte, se fera, outre l’emprunt auprès de la BCE des 100Mds destinés à l’investissement, par un effort en matière de prélèvements obligatoires (qui passeront globalement de 45% aujourd’hui à 49% en 2022 signe précisément du choix de société retenu et dont la moitié est, au passage, redistribué par les protections universelles dont la retraite à 60 ans), mais aussi par des efforts de contribuables mieux ciblés, efforts plus justes au regard des dérives accumulatives de ces dernières décennies et efforts surtout salutaires pour refaire société avec, par exemple, une réforme fiscale comprenant un retour à 14 tranches au niveau de l’impôt sur le revenu, l’instauration d’une taxe "grand luxe", d’une taxe sur les transactions financières, … avec toutefois, pour les TPE et PME, avec une baisse 8 points de l’IS.

Ce financement enclenchera enfin un désendettement du pays (taux abaissé de 98% à 87% en 2022). Il se fera certes avec un peu d’inflation (entre 2 et 4% soit pas plus que pendant les 30 glorieuses) en raison principalement de la hausse généralisée des salaires.

Un tel programme est parfaitement crédible au sens où il participe d’un projet, "un avenir en commun" opportun et abouti idéologiquement. Un programme prudemment chiffré … peut-être le plus abouti de tous les programmes. Au-delà de la perception que l’on peut avoir de la personnalité de son porteur, nous devons au moins lui reconnaître aussi la force de la conviction, l’autorité morale et l’expérience de la chose publique pour tourner la page de ces "quarante piteuses".

Je ne doute pas un instant, qu’à travail constant, les forts ne connaitront pas de déclassement et je reste aussi et surtout persuadé que les faibles retrouveront, par un retour bienfaisant au travail, le chemin de la reconstruction intérieure.

Dans un mois, il sera donc bien question de retenir un paradigme politique : veut-on d’une Réunion mieux portante dans une France elle-même mieux portante ou se contentera-t- on encore, par l’abstention, du statu quo ou en optant pour les candidats du système ?

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4 Commentaires
Phenae
Phenae
6 ans

Pour ce qui est de l'insoumission en Europe... Eric974, je ne t'apprendrais rien en te disant que c'est déjà le cas et que nombre de pays en Europe sont dans l'insoumission contrainte car incapables d'appliquer les traités à la lettre... notre insoumission serait juste plus une démarche d'honnêteté et de justice... permettant à d'autres pays étranglés de nous suivre.

Eri974
Eri974
6 ans

@Phenae :
Le traité de l' UE, c'est comme un contrat, quand t'es dedans, t'y es soumis, content ou pas content. Ce qui signifie qu'être "insoumis" DOIT revenir à sortir de ce contrat.. donc de l 'UE. Les Britanniques ont mis en route cette mécanique.

En bref, la démarche paradoxale d'insoumission en restant à l'intérieur de l' UE relève de l'incohérence ou de la malhonnêteté politique.

Renégocier le traité ? ou changer le traité ?
Renégocier, c'est synonyme de changer.
Changer une ligne d'un traité européen demande l'unanimité des 28 membres... en bref, impossible car il y a toujours eu jusqu' à présent au moins un Etat qui trouve son intérêt à ce qu'un texte ne bouge pas.(Cf. les différents débats stériles du Parlement Européen depuis plus de 20 ans....)

Phenae
Phenae
6 ans

Pour ce qui est de l'insoumission en Europe... Eric974, je ne t'apprendrais rien en te disant que c'est déjà le cas et que nombre de pays en Europe sont dans l'insoumission contrainte car incapables d'appliquer les traités à la lettre... notre insoumission serait juste plus une démarche d'honnêteté et de justice... permettant à d'autres pays étranglés de nous suivre.

Eri974
Eri974
6 ans

Une insoumission dans l' Europe ? ça ne veut rien dire: Nous sommes dans l' Union et sommes alors régis et soumis à des traités. Cette insoumission reviendrait à violer ces traités, ce qui est extrêmement grave pour nos relations européennes et extérieures car vous sapez un élément indispensable à nos relations diplomatiques et économiques: la confiance (au sens premier du terme).