Tribune libre de Wilfrid Bertile

Outre-mer : la thérapeutique de la responsabilité

  • Publié le 30 mars 2017 à 00:30

La Guyane nous le rappelle : les Outre-mer connaissent périodiquement des mouvements de contestation sociale qui peuvent, pour un rien, dégénérer. Voilà des décennies que cela dure. A chaque fois les gouvernements, quelle que soit leur couleur politique, adoptent la même attitude : on envoie des missions, on déplace des ministres, on dégage des crédits, on propose un ensemble hétéroclite de mesures qualifié de plan de Marshall ou d'avenir.

Cela pour les moments de tension. En période ordinaire, quand un problème se pose, on nomme un parlementaire ou un " expert " en mission, ou on crée une commission, ou on organise des " assises ", des " Etats-généraux ". On ne compte plus les " rapports ", les plans, les lois d’orientation, les lois de programme. Leur nombre témoigne de leur inefficacité, ce qui n’empêche pas les gouvernements qui se succèdent d’agir de la même façon.

Quel paradoxe que ces Outre-mer ! Ils disposent d’atouts, de crédits abondants, de fonctionnaires d’autorité souvent remarquables, de techniciens en nombre et pourtant, au fil du temps, leurs problèmes restent les mêmes, non résolus : vie chère, chômage de masse, pauvreté et précarité, illettrisme, inégalités sociales, montée de la délinquance, insécurité…

Parmi les raisons qui expliquent cette situation, il y a une question de méthode : on agit de façon sectorielle, cloisonnée, alors qu’il faudrait privilégier les actions transversales puisque tous les problèmes sont liés. Mais il y a surtout une question de fond : on fait comme en France, on assimile nos problèmes à des retards, alors que nous sommes autres : les Outre-mer n’ont pas qu’une différence de " niveau " avec la France métropolitaine, ils ont une différence de " nature ". On ne peut pas donc se contenter de dupliquer ce qui se fait en France métropolitaine.

Comme par son ADN toute personne  est unique, chacun des Outre-mer est un territoire particulier, peuplé d’une population qui a son identité propre. Il faut en conséquence pour chacun d’eux un projet adapté aux particularismes de son territoire et à la culture de sa population. Jusqu’ici, on a fait des documents de programmation financière (" Docup " au niveau européen, contrats de plan au niveau national), élaborés par des technocrates ou des bureaux d’études et adoptés généralement sans les lire par les élus. Il faut des projets de développement durable de chacun des Outre-mer, élaboré par le monde politique et la société civile…

Quand on regarde  les programmes des présidentielles, on est bien loin de ces préoccupations : un ambitieux, dans l’entourage des candidats, s’autoproclame spécialiste des Outre-mer et, parfois, en relation avec  des soutiens ultramarins, propose quelques mesurettes déconnectées de la réalité. Et on s’étonne après, que de mandatures en quinquennats, les problèmes ultramarins ne sont pas résolus. C’est aux Ultramarins de porter un projet d’ensemble pour chacun de leur territoire. C’est à l’opposé de la vision de " Paris " qui croit détenir la science infuse alors qu’au fond il ne comprend pas le film.

Wilfrid Bertile

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