Filière lait

Sicalait : le front syndical s'élargit

  • Publié le 22 décembre 2014 à 02:50

"Les éleveurs laitiers de la Plaine des Cafres ont demandé le soutien de la CGPER dans le combat qu'ils mènent contre la SICA Lait. Près de 40 éleveurs sur 73 remettent en cause le fonctionnement de la SICA Lait..." Ce texte laconique constitue le coeur du communiqué par lequel la Confédération paysanne de la Réunion (CGPER) annonce son implication dans le conflit social de la Sicalait (Photo archives).

Les dernières péripéties du conflit social initié avec la CFDT, par les salariés de la Sicalait et de Fermes et Jardins, soutenus par un groupe d'éleveurs décidés, ont sans doute levé les dernières réticences des éleveurs laitiers à se mêler d'un contentieux qui, initialement, ne les concernait qu'indirectement. En effet, la succession surréaliste d'actes contradictoires qui a vu le vrai-faux licenciement du directeur, Olivier Dekokère, le bureau du conseil d'administration sabordé, le président Patrick Hoarau se démettre par texto, et l'élection de son successeur en la personne de Julien Huet, traduit une évidente crise de confiance au sein de la coopérative des éleveurs laitiers.

Or cette crise d'appareil, à la tête d'une coopérative qui s'est tant diversifiée qu'elle semble en avoir oublié son utilité première, est sous-tendue depuis une décennie au moins, par une crise sanitaire, grave, dénoncée par l'Association de défense des agriculteurs réunionnais (ADEFAR) qui a joué un rôle, ingrat mais utile, de lanceur d'alerte. Aujourd'hui la Sicalait, dont 70% du cheptel est positif à la leucose bovine enzootique, et devrait en conséquence être abattu, pour satisfaire à la réglementation en vigueur pour la France métropolitaine (notre pays étant "officiellement indemne de leucose bovine enzootique"), voit sa production décroître au fil des ans et le nombre d'éleveurs laitiers, subir une véritable hécatombe, ruinés qu'ils sont par les maladies de leurs bêtes, incapables de rembourser ce qu'ils doivent à la banque, à l'Urcoopa, à la Sicalait même, faute de production. 

Ils étaient 151 en 2000, on n'en comptait que 73 en 2013. Pour nombre d'entre-eux, pris en tenaille dans un système intégré dont ils sont totalement dépendants, ficelés par des investissements engagés sur la base de business plans qui oscillent entre optimisme débridé et irréalisme, une fois les subventions absorbées par leur déficit chronique, il ne reste plus guère que le RSA pour survivre. Cette réalité déplorable, car publiquement dénoncée, mais ignorée voire camouflée par ceux qui auraient du s'en saisir, tant au niveau de la profession que de l'Etat, a finalement réussi à s'imposer à la Chambre d'agriculture. 

Le 5 décembre dernier, en assemblée plénière, la majorité des élus a voté une motion relative à la situation sanitaire de l'élevage bovin à La Réunion. Dans ce texte, les élus de la chambre se fondant sur l'évidente surmortalité qui sévit dans le cheptel réunionnais, mettant en cause la viabilité économique des élevages, ont demandé que soit réactivée la procédure d'autopsie des ruminants, précédemment financée par l’État, de façon à établir les causes de la surmortalité endémique des ruminants réunionnais. Dans la même logique, ils ont revendiqué la mise en œuvre d'un plan départemental d'étude épidémiologique afin de définir les conditions de régulation des maladies du bétail. Ils ont enfin manifesté la volonté de voir une véritable réflexion conduite sur le modèle d'élevage qui doit être pratiqué à La Réunion.

Une stratégie sanitaire, économique et politique

Leur démarche entre en résonance avec la volonté manifestée, le 7 novembre dernier, par Patrick Dehaumont, directeur Général de la DGA (Direction Générale de l'Alimentation), à l'issue de la mission ECOPHYTO conduite à La Réunion par le député Dominique Potier, à la demande du  Premier ministre. A commencer par la mise en œuvre d'enquêtes épidémiologiques qui permettront d'obtenir un état précis de la situation sanitaire du cheptel. 

Des élus CGPER, éleveurs de leur état, ont participé à la réunion leucose bovine enzootique du 7 novembre dernier, en compagnie de membres de l'Adefar. Ils savent bien que ce problème sanitaire ne pourra être réglé par un simple traitement administratif, tel que le cache misère que les hiérarques de la Sicalait et de la Direction de l'Alimentation, de l'Agriculture et de la Forêt de La Réunion (DAAFR), avaient mis en place pour déroger aux  normes sanitaires valant pour la France et l'Union Européenne. Car c'est sur la base d'un simple jeu d'écriture, légitimé par la Direction en charge de la santé et de la protection animale du ministère de l’Agriculture, que la Sicalait et la DAAFR, s'étaient permis de déroger aux mesures qu'imposent le dépistage et l'abattage obligatoires des bêtes positives à la leucose. Rien n'autorisait les responsables réunionnais de l'élevage à se dispenser de telles mesures réglementaires. 

L'implication de la CGPER aux côtés des éleveurs et des salériés, s'inscrit donc dans une stratégie sanitaire, économique et politique à laquelle l'actuel bureau de la Sicalait aura bien du mal à s'opposer.

Philippe Le Claire pour Imaz Press Réunion

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1 Commentaires
98574
98574
9 ans

Bon courage à tous mais les cops c est comme les assemblées y en a beaucoup de trop!!!!